Depuis la plus lointaine Antiquité, la plupart des civilisations ont vénéré une déesse, symbole de la féminité, de la fécondité, et de l’amour.
Le culte d’Aphrodite vient d’Asie, il émane de celui d’Astarté, divinité lunaire et principe de fécondité. Les Phéniciens firent connaître ce culte aux Grecs qui lui dédièrent de célèbres temples, comme à Paphos dans l’île de Chypre, ou Amathonte, dans l’île de Cythère… La plupart des cités grecques honoraient Aphrodite : Athènes, Thèbes, et surtout Corinthe, où un millier d’hétaïres (courtisanes) attendaient les pèlerins. Ce culte se développa très régulièrement jusqu’à l’époque romaine où Aphrodite renommée Vénus fut considérée, grâce à son fils Enée, comme la mère du peuple romain.
Aphrodite représente à la fois la beauté, l’amour, la vie, la mer et la victoire
les artistes depuis l’Antiquité la représentent entourée de symboles significatifs de sensualité (plantes et fleurs parfumées, myrte, œillet, jasmin) et d’ardeur sexuelle (animaux réputés très actifs comme le bouc ou le lièvre). Aphrodite possède en outre une ceinture magique (cadeau de Zeus) capable de réveiller l’ardeur des hommes et des Dieux engourdis dans la routine érotique ; selon la mythologie il arrive à la belle Déesse de prêter cet intéressant accessoire à Héra pour ranimer la flamme de son époux volage…
Le terme « aphrodisiaque » décrit un attrait puissant pour l’amour sensuel ; la sexologie utilise le terme «anaphrodisie» pour désigner un manque ou une absence de désir.
La naissance d’Aphrodite reste un mystère
Pour Homère, elle était la fille de Zeus et de Dioné, et l’épouse d’Héphaïstos, les artistes et les poètes ne retiendront pas cette hypothèse trop banale. La version d’Hésiode, diffère complètement, il affirme qu’elle serait sortie de l’écume des vagues à Paphos ou à Cythère, sous sa forme parfaitement accomplie. Et il précise que cette écume provenait des organes sexuels que Cronos, Dieu du temps, avait tranché à Ouranos, Dieu du ciel et jetés à la mer. Aphrodite fut accueillie par Eros et chacun de ses pas fit naître des fleurs.
Sa beauté est parfaite et sa sensualité illimitée, Aphrodite rend les dieux comme les hommes fous amoureux, et la liste de ses conquêtes est impressionnante.
Elle représente la transgression de l’ordre, le règne des passions, la toute puissance de l’élan vital que la société cherche à apprivoiser par ses lois, notamment celles visant à contrôler les femmes.
Épouse d’Héphaïstos, Aphrodite, fidèle à sa réputation multiplie les aventures; la mythologie grecque ancienne la présente sous un jour versatile et fantasque. La misogynie est une constante de la littérature comme l’illustrent notamment les maximes de Ménandre, le théâtre ou l’épopée, la femme précipite souvent l’innocent héros dans de périlleuses aventures. Homère raconte comment Hélios, le Soleil, révèle à Héphaïstos l’adultère de sa femme avec Arès; Héphaïstos les surprend ensemble, nus dans son lit, il les fait prisonniers dans un filet invisible. Puis convoque tous les dieux, à se régaler du spectacle, jusqu’au moment où Poséidon, Dieu de la mer, les incite à faire la paix. Des amours d’Arès et d’Aphrodite naissent Deimos et Phobos la Terreur et la Crainte. Arès, est le dieu de la guerre pour les Grecs, il représentent la barbarie, la sauvagerie, et non la gloire ou la vaillance que les Romains attribuèrent ensuite à Mars.
Pour la punir de ses inconduites Zeus inspire à la déesse l’amour d’un mortel, Anchise.
Mais cela n’arrêtera pas l’indomptable déesse, de ses amours avec Dionysos naît Priape, la divinité phallique, et de Poséidon, Eryx. Hermès, dieu des voleurs et messagers des dieux la courtise assidûment, en vain. Zeus, amateur de plaisanteries douteuses, vient en aide à Hermès en envoyant son aigle voler la sandale d’Aphrodite. Pour la récupérer, la déesse doit se soumettre aux ardeurs du fourbe. De leur union naît Hermaphrodite, de nature à la fois masculine et féminine.
Aphrodite n’a pas bon caractère, elle se venge des dieux et des humains qui l’offensent:
de Minos, roi de Crète, tombe amoureuse d’un taureau, et donne naissance à un monstre le Minotaure, qu’il faudra enfermer dans le labyrinthe du palais de Cnossos, et dévorera allègrement sa ration de jeunes gens, jusqu’à l’arrivée d’une certain Thésée.
Aphrodite châtie les femmes de Lemnos qui négligent son culte en les affligeant d’une odeur qui fait fuir leurs maris, mais, elle cède aux prières d’Héphaïstos et, à l’arrivée des Argonautes, les délivre de leur puanteur. Elle se montre particulièrement cruelle envers le fils de Thésée, Hippolyte, qui se croit hors d’atteinte des feux de l’amour; elle inspire à Phèdre, sa jeune et jolie belle-mère, une vive passion pour lui. Hippolyte repousse les avances de Phèdre, celle-ci, humiliée l’accuse d’avoir tenté de la violer, puis met fin à ses jours. Thésée, l’époux de Phèdre maudit alors son fils et le bannit. Hippolyte, muré dans son silence périt peu après de mort violente.
Aphrodite se venge encore de la muse Clio, qui s’est moquée de sa passion pour un simple mortel Adonis, en la faisant à son tour tomber amoureuse d’un homme. La muse Calliope, pour avoir arbitré le conflit entre Perséphone et Aphrodite, au sujet d’Adonis, assiste impuissante à la mort de son fils Orphée. Pour avoir dévoilé à Héphaïstos son aventure avec Arès, Hélios subit aussi la vengeance d’Aphrodite.
Enfin, la responsabilité d’Aphrodite dans la guerre de Troie n’est plus à démontrer! Jacques Offenbach, dans son opéra bouffe « La belle Hélène » fait chanter un air devenu célèbre » dis-moi Vénus, quel plaisir trouves-tu à faire ainsi cascader la vertu? »
La littérature grecque, n’a aucune indulgence à l’égard d’Aphrodite, la passion amoureuse qu’elle provoque génère des troubles et constitue une menace pour l’ordre établi.
Aphrodite, en attisant les désirs sexuels se situe à l’opposé d’Héra, protectrice du couple et garante de la famille. Les Romains vont interpréter autrement le personnage, et mettront l’accent sur les forces bénéfiques de la déesse, le poète Lucrèce, (de naturae rerum)voit en elle le principe même de la vie.
Les innombrables représentations d’Aphrodite ont évolué au fil du temps. On la trouve d’abord à Paphos, sous la forme très orientale d’un simple cône ou d’une pyramide entourée de flambeaux. Plus tard, on la retrouve à Chypre sous la forme d’une idole, entièrement nue. Vers le début du IV siècle avant notre ère, elle adopte un nouveau look : grave, virginale, drapée dans un long chiton, et couronnée d’un diadème. L’Aphrodite voilée du Parthénon en est l’exemple caractéristique. Aphrodite Nikêphore (porteuse de la victoire), nue jusqu’à la ceinture, beaucoup plus sensuelle, se régale de son reflet dans un bouclier. L’Aphrodite de Capoue, d’Arles et de Milo illustrent cette version. Enfin, vers le milieu du IV siècle, le célèbre sculpteur Praxitèle montre Aphrodite entièrement nue, symbole de l’amour et de la grâce voluptueuse: sa célèbre Aphrodite de Cnide servit de modèles à de très nombreux artistes, notamment romains.
Aphrodite, devenue Vénus a aussi inspiré les artistes de la renaissance comme Botticelli, Titien. L’universalité de Vénus traverse le temps, et depuis l’origine, les plus grands artistes ont honoré le culte de la Déesse à travers leurs chefs d’œuvre.